samedi 4 août 2012

Pas d'quartier!


Voilà un mois que j’ai quitté ma classe, salué mes collègues et renvoyé ces chères petites têtes blondes à leurs géniteurs. Un mois où j’ai regardé s’éloigner l’année écoulée et que je vois se profiler, à égale distance, la prochaine rentrée des classes.

« L’année scolaire est morte, vive l’année scolaire ! » s’écrient à l’unisson les bataillons de hussards et hussardes noirs (j’aime les hussardes). Le regard fier et les épaules conquérantes, chacun fourbit ses armes, caressant l’espoir d’amener encore une fois à bon port la fière troupe de gamins et de gamines placées sous sa coupe. L’objectif inatteignable voire inenvisageable en ce début de mois de septembre se révèlera à nos yeux au fur et à mesure que ce bateau qu’est ma classe affrontera grains et tempêtes, monstres et pirates, mutineries et épidémies. Je suis un capitaine de vaisseau - Mille sabords ! -, ma classe un fameux trois mâts - Hissez haut ! -, mes ouailles mon équipage - B’jour capt’n ! La tâche est ardue certes, mais, auréolée de nombreuses traversées transannéescolairiques, j’ai acquis une expérience certaine dans l’art de barrer une classe. « Souquez ferme, moussaillons ! »

Jour après jour, semaine après semaine, mon équipage s’endurcit, s’aguerrit, se fie à mon instinct de vieux loup de mer, et l’on peut dire alors que nous ne faisons plus qu’un : la classe, les gosses et moi. L’osmose quoi. D’une voix magistrale j’ordonne, d’un œil expert j’inspecte, d’une main de fer (un crochet) je maîtrise. « À bâbord toute ! Direction la mer des multiplications ! » Chaque traversée révèle son lot de fortunes, bonnes et mauvaises, qui contribuent à la cohésion de l’équipage ; néanmoins il est nécessaire de s’octroyer quelques haltes réparatrices : Atoll de Toussaint, Archipel de Noël et îlots de Pentecôte et Ascension sont autant d’escales nécessaires au moral de tous sur cet esquif. Et l’on embarque à nouveau : « Moussaillons, cap sur les falaises de la grammaire, on va pas rigoler ! ça va secouer ! Accrochez-vous au bastingage, j’en ai vu des coriaces qu’ont valsé par-dessus bord, on les a jamais récupérés…». Les actes de piraterie sont légion durant ce périple, les célèbres Barbante Noire et Long John « Papa Je-sais-tout » dressent leur drapeau macabre (une tête d’instit’ mort)  avant de hurler « À l’abordage, fonctionnaire de merde, pas d’quartier ! » Dans ces moments-là, il est nécessaire de garder la tête froide afin d’éviter l’abordage et la prise du contrôle du navire. Heureusement, au fil des voyages, ces attaques se font de plus en plus en rares.
En vieux loup de mer, je sais que toute traversée possède son Cap Horn, ses 40èmes Rugissants, ses 50èmes Hurlants. Pour un capitaine de classe le cauchemar se nomme…

« Mois de juin »

Récifs de fête des mères, Écueil de la fête d’école, Barrière de la sortie de fin d’année, Maelström du bulletin : autant de dangers redoutables qu’il faut affronter en 30 petits jours. Impossible de dormir ni même de s’assoupir, la vigilance est de rigueur. Nuit et jour, j’évite les naufrages, les échouages et sabordages, je tiens bon la barre, les embruns me fouettant le visage quand le sel marin me ronge les lèvres. « Sacrebleu, tous ensemble, fier équipage, on va se taper cette satanée fête d’école. Tous sur le pont, et on chante, on danse, on remue son popotin ! Que Neptune me soit témoin, je jette aux requins le moindre mutin ! » Ça tangue, ça roule, le chavirage n’est pas loin mais ça finit par passer. Saint Nino Ferrer, priez pour nous.
Les célèbres et redoutées Récifs de Fête des mères sont pour un capitaine une menace qui peut ruiner une traversée : perte du navire sur les rochers acérés du Collier de pâte suivi d’un déchiquetage en règle par les sirènes-mamans… J’en frémis rien qu’à l’évoquer.

Heureusement, une nouvelle fois, la traversée 2012 s’est bien déroulée. Nous sommes tous arrivés sains et saufs à bon port : le 4 juillet. L’équipage est reconnaissant, mon vaisseau, le Black Tableau,  a subi quelques avaries mais a tenu bon. Je suis un capitaine heureux.

2 commentaires:

  1. lool excellent !! Tu donnerais presque vraiment envie !!!

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  2. j'adore!!!!
    ça donne envie d'être en septembre, tiens!

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